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2 millions de francs suisses pour découvrir la diversité du cytosquelette microbien

Un projet collaboratif entre l'UNIGE et de l'EMBL obtient un financement de 2 millions de francs de la Fondation Gordon et Betty Moore pour une recherche innovante sur la biodiversité.

Eucaryotes microbiens observés à l'aide de la microscopie d'expansion. Image créée par Omaya Dudin.

 

L'Université de Genève (UNIGE), en collaboration avec l'EMBL, s'est vu attribuer 2 millions de francs suisses par la Fondation Gordon et Betty Moore pour un projet de recherche innovant sur la biodiversité. Dirigée par le professeur Omaya Dudin (UNIGE) et le Dr Gautam Dey (EMBL), cette initiative ambitieuse permettra de développer un atlas morphologique des eucaryotes microbiens, des organismes encore largement inexplorés et pourtant vitaux pour les écosystèmes.

En utilisant les dernières avancées en microscopie d'expansion, l'équipe mettra en œuvre l'imagerie et l'analyse à haut débit pour construire un atlas volumétrique en 3D capturant la diversité cellulaire et cytosquelettique de ces micro-organisme tout au long de leur cycle de vie. Des collaborations étroites avec des collections de cultures et le laboratoire de Thomas Richards (Université d'Oxford) joueront un rôle crucial pour assurer une sélection diversifiée et représentative des espèces. Ce travail vise à améliorer la compréhension de l'évolution et de l'adaptation des eucaryotes microbiens et de leurs interactions critiques au sein des écosystèmes.

Les eucaryotes microbiens jouent un rôle fondamental dans les écosystèmes et la biodiversité sur Terre, mais leur étude s'est largement concentrée sur la génomique. Si cette approche a permis d'obtenir des informations essentielles sur leur évolution et leur fonction, l'absence de données phénotypiques correspondantes, notamment grâce à la microscopie à haute résolution, limite la compréhension de leurs structures cellulaires et de leurs cycles de vie. Cette lacune découle des difficultés liées à l'imagerie des petits organismes, notamment la faible pénétration des anticorps et les limites de résolution de la microscopie conventionnelle.

Omaya Dudin, professeur assistant à la Faculté de chimie et de biochimie de l'Université de Genève (UNIGE), et Gautam Dey, chef de groupe à l'EMBL, ont reçu 2 millions de francs suisses de la Fondation Gordon et Betty Moore pour relever ces défis. Leur travail consistera à mettre en œuvre un flux d'imagerie à haut débit utilisant la microscopie d'expansion (ExM), une technique qui agrandit physiquement les échantillons jusqu'à une résolution nanométrique tout en améliorant l'accessibilité des anticorps et des colorants. Le projet vise à créer un atlas morphologique des eucaryotes microbiens, en intégrant les données phénotypiques aux analyses génomiques et transcriptomiques. En caractérisant la diversité cellulaire et cytosquelettique, la recherche crée un pont entre la biologie moléculaire et la biologie structurale, enrichissant ainsi la compréhension de la vie microbienne et complétant les études sur la biodiversité. L'adoption plus large de l'ExM pour les organismes non modèles est un autre résultat attendu.

Pour maximiser son impact, le projet impliquera activement la communauté des chercheurs dans l'identification et la sélection des organismes cibles. Les collaborations avec des organismes gérant des collections de cultures joueront un rôle crucial pour assurer une sélection diversifiée et représentative des espèces. Les organismes seront choisis en fonction de leur pertinence par rapport à des questions scientifiques clés, telles que les stratégies mitotiques, la multicellularité, l'évolution des thylakoïdes/plastides et l'eucaryogenèse, ainsi que de leur aptitude à l'imagerie, notamment leur facilité de culture, leur grande abondance et leur état de séquençage.

Au-delà de la production de données, le projet s'engage à rendre ses résultats accessibles en temps réel. En diffusant les données d'imagerie par l'intermédiaire d'une plateforme en libre accès intégrée aux principales ressources sur la biodiversité, l'équipe vise à accélérer l'échange mondial de connaissances et à permettre une intégration plus rapide des données phénotypiques et structurelles avec les ensembles de données génomiques et transcriptomiques existants. Cette approche garantit que l'atlas deviendra une ressource vivante, continuellement mise à jour et élargie par la communauté scientifique.

Le projet aspire également à devenir un centre mondial pour l'imagerie microbienne, en proposant des ateliers, des programmes de formation et des outils en libre accès pour faciliter l'adoption généralisée de la microscopie d'expansion. Bien que l'accent soit mis sur les eucaryotes, l'équipe reste déterminée à soutenir la communauté de recherche microbienne au sens large, en fournissant des conseils et une expertise à ceux qui étudient d'autres organismes, y compris les bactéries et les archées.

En créant un atlas de microscopie d'expansion des eucaryotes microbiens (ExÂme) évolutif, inclusif et piloté par la communauté, avec un partage ouvert et en temps réel des données, ce projet permet non seulement de combler des lacunes critiques dans notre compréhension des eucaryotes microbiens, mais aussi de jeter les bases des découvertes transformatrices dans les domaines de la biodiversité, de la biologie cellulaire et de la biologie de l'évolution.

PROF. OMAYA DUDIN

Après avoir étudié la biologie cellulaire et la microbiologie à l'Université de Grenoble, Omaya Dudin a rejoint le laboratoire de la Professeure Sophie Martin à l'Université de Lausanne (UNIL) pour ses recherches doctorales, soutenant en 2016 une thèse sur les mécanismes de fusion cellulaire chez la levure à fission. De 2017 à 2020, grâce aux bourses FNS Mobility et Marie Curie, il a mené des recherches postdoctorales à l'Institut de Biologie Évolutive de Barcelone, explorant la physiologie des protistes unicellulaires proches des animaux. En 2020, il a lancé sa recherche indépendante et créé son laboratoire à l'EPFL, financé par une bourse SNSF Ambizione, poursuivant ses recherches sur les mécanismes évolutifs permettant aux organismes unicellulaires de devenir multicellulaires.

Depuis août 2024, le DudinLab fait partie du Département de biochimie de l'Université de Genève. Le laboratoire s'attache à comprendre comment et pourquoi les organismes unicellulaires évoluent vers des formes multicellulaires. Actuellement, l'équipe étudie comment diverses espèces d'ichtyosporées - proches parents des animaux (cousins au troisième degré) - exécutent des programmes de développement multicellulaire distincts pour créer diverses structures multicellulaires transitoires. En étudiant ces processus, le laboratoire vise à découvrir les principes fondamentaux qui régissent l'évolution du développement multicellulaire, à la fois à la racine des animaux et plus largement dans l'arbre de la vie eucaryote.

Gordon and betty moore foundation

La Fondation Gordon et Betty Moore encourage la découverte scientifique, la préservation de l'environnement et le caractère particulier de la région de la baie de San Francisco. Visitez moore.org et suivez @MooreFound.

18 décembre 2024
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