Journal n°109

Des femmes sans statut légal mais pas dépourvues de droits

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Elles ont beau séjourner à Genève sans permis, cela ne les prive pas de nombreux droits. Des étudiants viennent de publier une brochure à l’adresse de ces femmes sans statut légal

Dans le cadre de la Law Clinic sur les droits des personnes vulnérables, des étudiants de la Faculté de droit de l’Université de Genève ont publié une brochure sur les droits des femmes sans statut légal à Genève. Entretien avec Djemila Carron et Olivia Le Fort Mastrota, coresponsables de cette Law Clinic sous la direction académique de la professeure Maya Hertig Randall.

Qu’entend-on par personne sans statut légal?

Djemila Carron: D’un point de vue légal, il s’agit de toutes les personnes présentes sur le territoire suisse en infraction avec les conditions d’entrée ou de séjour fixées par la Loi fédérale sur les étrangers. Au vu de cette définition, il ne peut pas exister de statistiques officielles, mais Genève compterait entre 8000 et 12 000 personnes sans statut légal. Près de 80% d’entre elles sont des femmes, travaillant majoritairement dans le domaine de l’économie domestique. Elles constituent un groupe très hétérogène: elles viennent de toutes les régions du monde, émigrent pour des raisons diverses et ont des parcours de vie différents.

A quels problèmes d’ordre juridique ces personnes sont-elles confrontées?

Olivia Le Fort Mastrota: Outre les problèmes spécifiquement liés à leur séjour en Suisse, les femmes sans statut légal sont confrontées à des questions touchant notamment le travail, les assurances sociales, l’accès aux soins médicaux, la violence ou encore la scolarisation des enfants.

Djemila Carron: Ce que ces personnes ignorent souvent, c’est que l’irrégularité de leur séjour ne les prive pas de nombreux droits. Cela dit, ces femmes craignent trop souvent de revendiquer leurs droits, par peur de se faire découvrir.

Comment comptez-vous atteindre ces femmes?

Olivia Le Fort Mastrota: Principalement par le biais d’une brochure basée sur des avis de droit qu’ont préparés et rédigés deux volées d’étudiants de Master en droit. Ces avis de droit ont été soumis à la relecture de spécialistes. Une fois les aspects juridiques validés, un important travail a consisté à vulgariser le contenu de la brochure pour le rendre accessible aux femmes en situation irrégulière à Genève mais également aux hommes qui se trouvent dans une position identique ainsi qu’à toute personne intéressée. La brochure comporte également une liste des nombreuses abréviations que l’on retrouve dans les lois et documents de l’administration ainsi que des adresses utiles, notamment les institutions et associations présentes sur le terrain.

Djemila Carron: La première brochure que nous avons publiée, sur les droits des personnes «roms» en situation précaire à Genève a par exemple permis d’amorcer un dialogue avec la police genevoise sur certaines divergences d’interprétation du droit au niveau de pratiques quotidiennes. De plus, les informations que nous donnons dans la brochure se basent sur des questions que nous ont posées ces femmes au travers des associations et permanences juridiques avec qui elles sont en contact.


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