Aristote revient chez les Helvètes le temps d’une conférence
Repenser la Suisse sous l’angle métaphysique, c’est l’objectif des conférences organisées par le Département de philosophie, dans le sillage de la publication, l’an dernier, d’un ouvrage illustré
«Aristote chez les Helvètes» est d’abord un ouvrage de vulgarisation scientifique imaginé par deux philosophes de la Faculté des lettres, Anne Meylan et Olivier Massin. Et depuis début février, pour que le lecteur ne se retrouve pas seul chez lui avec ses questions, c’est aussi un cycle de conférences proposées en Suisse romande. Le 3 mars prochain à Uni Mail, le professeur Marcel Weber et Emma Tieffenbach interrogeront deux grands symboles helvétiques: l’argent et la vache.
Questionner le monde
Domaine de recherche en pleine effervescence, la métaphysique s’intéresse à la nature de toute chose. Aristote la définissait comme la science de «l’être en tant qu’être». La métaphysique, c’est se demander si les mélanges existent (… comme une fondue), réfléchir à ce qu’est un trou (… dans l’emmental) ou encore s’interroger sur la nature d’une frontière
(… telle que le Röstigraben).
Et c’est en y pensant à voix haute qu’Anne Meylan et Olivier Massin en sont venus à imaginer un recueil qui traiterait de ces questions, autour de la thématique helvétique. «Notre moteur a toujours été le désir de connaître le monde. Nous ne voulions pas seulement émerveiller les gens avec ses paradoxes, mais montrer comment ceux-ci sont résolus de manière scientifique par les métaphysiciens», explique Anne Meylan. En effet, la philosophie se pratique comme les autres sciences: méthode et rigueur sont de mise et les articles scientifiques sont relus par des pairs avant de pouvoir être publiés dans des revues internationales. «Le public pense souvent que les philosophes pratiquent la réflexion libre, alors qu’en réalité, ce sont des chercheurs comme les autres», continue la coéditrice.
Attirer le public
Si l’ouvrage aborde de vraies questions de métaphysique – la connotation helvétique et l’humour en plus –, le défi était d’attirer le lecteur grâce à des questions simples, auxquelles chacun peut s’exercer à répondre, comme autour des trous par exemple. Extrait: «Sans trous, pas d’emmental. C’est ce qui fait la beauté d’une tranche d’emmental, son essence. S’ensuit-il qu’en achetant un morceau d’emmental, nous achetions en réalité deux sortes de choses: la matière comestible et les petites portions de vide qui l’accompagnent? Bien sûr, nous ne pouvons pas prendre le fromage et laisser les trous chez l’épicier, tout comme nous ne pouvons pas manger le fromage et garder les trous pour plus tard. Pourtant lorsque nous mangeons du fromage, il est certain que nous ne mangeons pas de trous.»
«Dans les médias, pratiquement seules les questions d’éthique sont traitées, soit une infime partie du champ de la philosophie, regrette Anne Meylan. L’ouvrage montre ce qui est effectué dans nos universités.» Publié l’an dernier grâce à un subside Agora du FNS et finement illustré par Baba, l’ouvrage a déjà été vendu à 1500 exemplaires. Quant à l’avenir, il se dessinera prochainement sur le site RTSdecouverte.ch
| mardi 3 mars |
18h30 | Uni Mail, salle MR070