28 août 2025 - UNIGE

 

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Le néolithique, douce transition

Il y a 9000 ans, les chasseurs-cueilleurs d’Europe et les agriculteurs venus d’Anatolie par la route du Danube ont cohabité et se sont progressivement mélangés.

 

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Les premiers agriculteurs sont venus en Europe par la «route du Danube». Image: Adobe Stock (générée par l'IA)

 

Il y a presque 9000 ans, les premiers agriculteurs et agricultrices originaires des régions bordant la mer Égée et l’ouest de l’Anatolie (actuelle Turquie asiatique) ont commencé à migrer le long de la route du Danube jusqu’en Europe centrale (nord de l’Allemagne) où ils ont progressivement imposé leur nouveau mode de vie. C’est ainsi que celui des chasseurs-cueilleurs a finalement été remplacé par celui des agriculteurs. Mais cette transition néolithique ne se serait pas réalisée par confrontation violente ou remplacement total. Les deux cultures auraient en réalité coexisté pendant plusieurs générations, selon les résultats d’une étude parue dans la revue Science Advances du 20 août et dont le dernier auteur est Mathias Currat, maître d’enseignement et de recherche au Département de génétique et évolution (Faculté des sciences).

Les indices archéologiques – tels que la coexistence d’objets typiques des deux cultures – et paléogénomiques – issus de l’analyse de restes humains bien conservés – montrent que la transition néolithique est le fruit d’une migration des agriculteurs sur les terres des chasseurs-cueilleurs plutôt que celui d’une simple transmission des connaissances entre populations. Pour en savoir plus sur ce processus, les scientifiques se sont penchés sur les dynamiques démographiques le long de la route du Danube. Ils ont pour cela modélisé l’expansion néolithique en simulant les positions géographiques, les paramètres biologiques (taille des populations, taux de reproduction, migrations) et les interactions (taux de mélange génétique entre groupes, compétition potentielle). Ces simulations ont permis de générer des milliers de scénarios génétiques qui ont ensuite été comparés aux données issues de 67 individus préhistoriques provenant de régions où les deux groupes ont cohabité.

Selon les paramètres démographiques les plus probables, au fur et à mesure de l’expansion des premiers agriculteurs vers le nord-ouest de l’Europe, les mélanges génétiques avec les chasseurs-cueilleurs sont d’abord rares avant d’augmenter localement. Des résultats qui militent en faveur d’une transition néolithique marquée par une cohabitation prolongée avec des mélanges croissants.

L’étude met en lumière l’avantage démographique dont disposent les premiers/ères agriculteurs quand ils pénètrent en Europe centrale. Leur population effective est alors environ 5 fois plus importante que celle des chasseurs-cueilleurs. Certains agriculteurs ont même fait des «sauts migratoires» sur de longues distances. Des événements certes rares, mais qui favorisent leur rapide progression le long de la route du Danube.

L’article apporte ainsi une réponse nuancée à un débat de longue date sur la transition néolithique de l’Europe. Celle-ci n’a pas été une simple colonisation mais un processus complexe fait de contacts, de cohabitations et de mélanges augmentant graduellement dans le temps.

 

 

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