Expérimentation animale: l’UNIGE décerne son prix 3R
L’UNIGE distingue une étude qui a permis de produire des neurones auditifs, indispensables à la recherche sur certaines formes de surdité, sans utiliser de souris de laboratoire.
© UNIGE. De gauche à droite, les lauréats Francis Rousset et Pascal Senn
Réduire le nombre d’animaux utilisés, raffiner les méthodologies pour limiter les contraintes subies, remplacer le modèle animal dès que c’est possible: les principes du 3R, appliqués par les équipes de recherche de l’Université de Genève (UNIGE), fondent la démarche éthique dans le domaine de l’expérimentation animale. Le prix 3R, décerné depuis 2016, récompense cette année une étude du Département des neurosciences cliniques de la Faculté de médecine sur la culture de neurones auditifs. Cette recherche, publiée dans la revue Hearing research, montre qu’il est possible de «sauter» l’étape de l’expérimentation animale en exploitant un type précis de cellules souches. Le prix 3R de l’UNIGE sera remis le 7 juin, lors de la remise des diplômes de la Faculté de médecine.
Depuis 2016, l’Université de Genève (UNIGE) remet chaque année son prix 3R – pour «réduire», «raffiner» et «remplacer» - à une recherche visant à limiter l’expérimentation animale. Cette année, le jury a primé les travaux de Francis Rousset et Pascal Senn, tous deux chercheurs au sein du Département des neurosciences cliniques de la Faculté de médecine.
Cette distinction leur est attribuée pour leur étude intitulée «Phoenix auditory neurons as 3R cell model for high throughput screening of neurogenic compounds» et récemment publiée dans la revue Hearing research. Le prix doté de 5000 francs pour les activités du laboratoire des deux chercheurs sera remis le 7 juin.
«Francis Rousset et Pascal Senn travaillent depuis plusieurs années sur les moyens de rétablir et régénérer le système auditif lorsque celui-ci a subi une perte. Ce type de recherches s’appuie fréquemment sur l’expérimentation animale. Leurs travaux proposent une alternative à l’utilisation de modèles in vivo en utilisant un certain type de cellules souches pour générer des neurones auditifs», explique Daniele Roppolo, directeur de l’expérimentation animale de l’UNIGE.
Une alternative efficace
Dans les laboratoires de recherche, des composés neurotrophiques – des molécules permettant la croissance des neurones – sont en effet fréquemment utilisés pour favoriser la régénération des neurones auditifs, qui relient les cellules sensorielles de l’oreille interne au tronc cérébral. Ces neurones sont des cibles pertinentes pour les interventions pharmacologiques visant à protéger ou améliorer la fonction auditive dans diverses formes de surdité. Toutefois, en l’absence de modèles in vitro capables de reproduire la physiologie complexe du système auditif, la recherche dans ce domaine repose principalement sur l’utilisation de modèles animaux, chez qui des neurones sont prélevés.
La découverte récente de neuroprogéniteurs auditifs (ANPG) «phoenix» – des cellules souches permettant de produire des neurones auditifs – ouvre la voie à une sensible réduction de l’expérimentation animale dans ce domaine. Dérivés de souris et dotés d’une capacité sans précédent d’auto-renouvellement, ces ANPG peuvent en effet être congelés et donc largement diffusés à d’autres laboratoires de recherche, remplaçant ainsi l’expérimentation animale dans certains aspects de la recherche en neurosciences auditives.
L’étude de Francis Rousset et Pascal Senn a permis d’approfondir la caractérisation des ANPG «phoenix». Les deux chercheurs démontrent que ceux-ci offrent, outre la réduction de l’utilisation de modèles animaux, une gamme considérable d’avantages dont une grande facilité de culture et de croissance et la reproduction in vitro du ganglion spiral, une structure indispensable à l’audition.
Grand nombre de candidats
Pour cette édition 2022, le prix 3R de l’UNIGE a reçu huit dossiers de candidatures. «Nous avons mené une véritable campagne de sensibilisation auprès des chercheurs et des chercheuses et constatons que ce type d’opération fait véritablement évoluer les mentalités», se réjouit Daniele Roppolo.
Le jury était composé cette année de quatre professeur/es de l’UNIGE: Emi Nagoshi, Jean-Luc Wolfender, Pierre Cosson et Patrycja Nowak-Sliwinska. Parmi les critères pris en compte figuraient la dimension 3R de la recherche mais aussi l’originalité de la méthode, l’applicabilité large des résultats et la qualité du dossier.
12 avr. 2022