25 janvier 2024 - VM

 

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Du droit de l’eau

 

 

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Élément essentiel à la vie sur Terre, l’eau est une ressource qui se fait rare. Alors que l’eau douce équivaut à moins de 1% de l’ensemble de l’eau présente sur la planète, sa consommation a en effet été multipliée par six au cours des cent dernières années, tandis que dégradations et dérèglements environnementaux pèsent de plus en plus sur les systèmes aquifères. Face à ce constat, il est indispensable de se doter d’outils permettant d’assurer la sauvegarde de cette ressource au niveau international. Un objectif qui est encore loin d’être atteint même si d’importants progrès ont été réalisés au cours des dernières décennies. Comme le rappelle Laurence Boisson de Chazournes, professeure à la Faculté de droit, dans ce texte présenté lors de sa nomination à la chaire Avenir commun durable du Collège de France, l’entrée de l’eau dans le monde du droit est relativement tardive.

Même s’il existe dès l’Antiquité des instruments juridiques régissant les usages des ressources en eau, ce n’est qu’à partir de la fin du XIXe siècle que les fleuves et les lacs frontaliers suscitent l’attention du droit international moderne. Il s’agit alors de concilier délimitation des territoires et besoins des populations locales tout en favorisant la liberté de navigation nécessaire à l’accroissement des échanges commerciaux. L’idée qui prévaut dès lors est d’assurer un partage équitable et raisonnable des ressources disponibles. Pensé dans un contexte d ’abondance, ce postulat est remis en question dans la dernière partie du XXe siècle pour faire place à une gestion plus durable des cours d’eau visant à prendre en compte le bassin hydrologique dans son entier et tenant compte non seulement des enjeux sociaux et économiques, mais aussi du respect de l’environnement. Concrétisé par l’émergence d’un droit humain à l’eau, ce mouvement s’est largement affirmé dans le cadre du droit onusien, l’un des objectifs de développement durable adoptés en 2015 garantissant notamment l’accès à l’eau potable et à l’assainissement pour toutes et tous en 2030. Mais il reste de nombreux trous dans le filet. Les eaux souterraines, qui représentent 99% des ressources en eau douce disponibles sur la planète, échappent ainsi encore largement au droit international. Les formations glacières, telles que les icebergs, sont dans une situation identique, de même que l’eau atmosphérique contenue dans les nuages. Enfin, en temps de guerre, l’eau reste une cible prisée par les belligérants comme en témoignent les nombreuses attaques subies au cours des derniers mois par les infrastructures hydrauliques ukrainiennes.


Laurence Boisson de Chazournes
«L'eau en droit international: entre singularité et pluralité»
Éditions Fayard 2023
80 p.

 

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