Le médecin et la mort

Le Dr Gérald d’Andiran fut le commissaire de l’exposition Du corps aux étoiles, la médecine ancienne présentée au musée de la Fondation Martin Bodmer (2010-2011). Cette exposition d’histoire de la médecine demeure l’une des plus exceptionnelles et mémorables jamais présentées. Le catalogue dirigé par Gérald d’Andiran avec la collaboration de Charles Méla, Vincent Barras, Silviane Messerli, Élisabeth Macheret-van Daele (mais aussi avec de nombreux rédacteurs spécialistes) demeure aujourd’hui encore l’ouvrage que le décanat de la Faculté de médecine de l’Université de Genève offre en cadeau de départ à chaque professeur parvenu à l’âge de la retraite.

Dans cette exposition, l’histoire de la médecine «ancienne» (de l’Antiquité au XVIIe siècle) était traitée dans une perspective historique, scientifique et artistique, nouant les instruments intellectuels de l’examen des maladies aux représentations spirituelles de l’homme. Les origines grecques de l’art médical, les routes de la traduction et les vecteurs cosmopolites de transmission de ce savoir étaient expliqués. Au Moyen Âge, le savoir de l’héritage antique d’Hippocrate se combine à la science des astres, à travers les représentations riches et variées de l’homme zodiacal, de la mélothésie, de l’astrolabe et de l’alchimie. Par une succession de jalons, une science de la médecine se rapprochant de notre modernité s’élabore lors des Renaissances humanistes au gré de découvertes et de progrès scientifiques, du XIVe au XVIIe siècles.

Si des emprunts auprès de 34 institutions suisses et étrangères renforcèrent le propos de cette exposition, de nombreux documents remarquables (manuscrits, incunables et premières éditions imprimées) provenaient directement de la collection de la Bibliothèque Bodmer elle-même. Quinze ans plus tard, et tandis que la Fondation Martin Bodmer connaît des travaux de rénovation, le prof. Jacques Berchtold (directeur) et Yoann Givry (collaborateur scientifique) présentent cette exposition graphique à travers une sélection de planches illustrées d’intérêt particulièrement remarquable.  

Quelques documents témoignent de l’étroite et régulière collaboration entre la Fondation et la Faculté de médecine de l’Université de Genève. En 2016, la Fondation Bodmer consacra à Frankenstein une exposition mémorable, à l’occasion du second bicentenaire de la rédaction géniale du premier jet de ce roman de Mary Shelley à Cologny. En 2017, ce fut Goethe qui fut célébré par une exposition et en particulier son Faust II dont de nombreuses éditions sont conservées dans nos collections. En ces deux occasions se consolidèrent des liens étroits entre la Fondation Martin Bodmer et la Faculté de médecine (en particulier les recherches de l’Institut Éthique Histoire Humanités dirigé par Samia Hurst) à la faveur d’échanges réguliers et féconds dans le cadre des enseignements d’histoire de la médecine et de dialogue avec les chercheurs des unités «Éthique et science» et «Éthique biomédicale».

Un témoignage est rendu à ces collaborations à travers plusieurs planches commentées de façon particulièrement approfondie avec les étudiants et enseignants-chercheurs de l’Université lors de leurs visites, notamment l’œuvre du médecin bâlois Paracelse (1493-1541), des planches d’écorchés d’André Vésale (1514-1564), Frankenstein de Mary Shelley (1797-1851), ou encore de la fabrication ex utero de l’homoncule du Faust II de Goethe (1749-1832). Autant de documents du passé qui nourrissent et inspirent de façon remarquable des réflexions cruciales et nécessaires de l’actualité présente de notre modernité.

2 avr. 2025

Exposition Bodmer - Histoire(s) de la médecine