9 mars 2022 - JE

 

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«La Suisse peine à reconnaître ses faces obscures»

 

 

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Qu'il s'agisse de la participation de négociants genevois à la traite des esclaves ou des considérations du naturaliste Carl Vogt sur la hiérarchie des «races humaines», Genève comme beaucoup d’autres cités européennes et américaines fait l’inventaire de son héritage colonial et raciste. Le 1er mars, la Ville de Genève a ainsi rendu public un rapport commandé à deux historiens de l’Institut de hautes études internationale et du développement. Elle s’apprête maintenant à «déterminer les solutions pouvant être mises en place pour répondre aux enjeux à la fois mémoriels et de lutte contre le racisme que posent les monuments recensés.» Professeure honoraire du Département d’histoire générale (Faculté des lettres) et auteure de nombreux ouvrages de référence sur l’histoire de l’esclavage et de la colonisation, Aline Helg commentait cette démarche dans les colonnes du Matin Dimanche, le 6 mars.

Pour expliquer pourquoi il a fallu attendre si longtemps avant que la Suisse reconnaisse officiellement sa participation à l’esclavage, elle rappelle «la tendance du pays à se projeter dans un rôle de neutralité et sa peine à reconnaître ses faces obscures». Lors de la Conférence mondiale contre le racisme organisé en 2001 à Durban, la Suisse a ainsi reconnu l’esclavage comme un crime contre l’humanité, sans pour autant admettre sa participation. Or elle a joué un rôle direct bien que marginal relève l’historienne: «Sur les 11 millions d'Africains déportés vers les Amériques, on estime la participation des financiers suisses à 1,5%, soit tout de même 165 000 personnes.» Pour Aline Helg il est impératif de reconnaître la traite et l’esclavage des Africain-es et de leurs descendant-es comme des crimes contre l’humanité dans lesquels la Suisse a eu sa part. Cette réflexion ne doit toutefois pas être tournée uniquement vers le passé. Elle doit aussi servir à éclairer, selon elle, nos comportements actuels: «Aujourd'hui, une partie importante de notre consommation dépend de la surexploitation du travail de femmes, d'enfants et d'hommes, et contribue également à la destruction des écosystèmes.»

 

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