11 mai 2023 - Anton Vos
La volcanologie cryptique des manuscrits médiévaux
L’analyse des textes médiévaux mentionnant les éclipses de Lune a permis de dater avec précision certaines des plus grandes éruptions survenues entre 1100 et 1300, juste avant le petit âge glaciaire.
Enluminure de la fin du XIVe ou du début du XVe siècle, qui représente deux personnes observant une éclipse de lune. L’enluminure comporte les mots «La lune avant est éclipsée». Image: BnF
La datation des éruptions volcaniques du passé représente une donnée importante dans la reconstruction du climat au cours de l’histoire et de son impact sur les sociétés. Mais elle reste un défi pour les scientifiques. Pour améliorer sa précision, Sébastien Guillet, chercheur à l’Institut des sciences de l’environnement (ISE, Faculté des sciences), et ses collègues présentent, dans un article de la revue Nature du 5 avril, une source d’information assez inhabituelle: les moines du Moyen Âge. Ces derniers ont en effet, sans le savoir, consigné dans leurs chroniques des indices permettant aux scientifiques d’aujourd’hui d’affiner l’estimation des dates de ces événements naturels n’ayant laissé aucun témoignage direct. C’est l’observation par les religieux de la couleur de la Lune lors de ses éclipses qui a mis les chercheurs et les chercheuses sur la piste. Lorsqu’elle est rouge foncé, tout est normal. Lorsqu’elle est noire, c’est qu’il flotte dans la stratosphère un voile d’aérosols produits quelques mois plus tôt par une activité explosive d’un volcan quelque part sur le globe. La technique a permis aux scientifiques genevois-es de préciser la date de cinq éruptions majeures survenues entre 1100 et 1300 et qui ont probablement contribué au petit âge glaciaire ayant suivi cette période.