Hieroglossia and Sino-Japanese dialectics
1-2 septembre 2025
Bâtiment des Philosophes (bd des Philosophes 22, 1205 Genève),
salle PHIL 211
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L’importance cruciale de la langue chinoise dans tout l’Extrême-Orient, et en particulier pour le Japon où elle est parvenue dès le Ve siècle de l’ère chrétienne, constitue un trait profond et durable de l’histoire culturelle de ces pays, et peut être comparée à l’usage du grec dans l’empire romain, ou du latin dans toute l’Europe médiévale et au-delà, donc non seulement comme un simple outil de communication, mais aussi comme un paradigme d’excellence culturelle. Cette rencontre majeure entre la Chine et le Japon a donné lieu dans l’archipel à un large éventail de phénomènes, caractérisés par un haut degré d’hybridité dans tous les domaines expressifs.
De plus, cette relation entre Chine et Japon prend la forme d’une hiérarchie symbolique, la Chine étant tenue à l’époque pour constituer un modèle à suivre – ou à dépasser – dans toute l’Asie de l’Est. Le rôle crucial joué par les traductions en chinois des textes sacrés du bouddhisme (sūtra) depuis les langues de l’Inde pendant sa diffusion dans l’ensemble de cette région du monde explique également le prestige extraordinaire associé à la langue chinoise, non seulement comme une langue de culture, mais aussi comme la langue du Buddha lui-même dont les prêches ont, selon la tradition, été transcrits dans les sūtra.
Le concept de « hiéroglossie » élaboré par Jean-Noël Robert cherche précisément à rendre compte de cette relation complexe entre une langue de référence et une langue vernaculaire (en l’occurrence le chinois et le japonais) en tenant compte de l’apport doctrinal (ici la religion bouddhique). Le choix de ce néologisme permet d’insister sur la sacralité de la langue dans la sphère religieuse, ce qui n’est pas sans impact sur les autres aspects de la culture au sens large, dans la mesure où le phénomène hiéroglossique s’est manifesté au Japon sous la forme d’un transfert conçu comme un double processus d’adoucissement (du rude vers le souple) et de familiarisation (du lointain vers le proche).
Outre le domaine proprement religieux, cette dialectique entre les deux langues s’est donc révélée la plus ouvertement féconde dans la production poétique de l’archipel, mode expressif qui, plus que tout autre, révèle les négociations cruciales entre le prestige du modèle chinois et la vitalité du japonais vernaculaire.
Prenant comme cadre cette notion clé, ce colloque a pour ambition de prolonger les nombreuses rencontres internationales déjà organisées par Jean-Noël Robert depuis une
dizaine d’années[1], et de cartographier cette dialectique langagière, symbolique et poétique.
La langue de travail du colloque sera l'anglais.
[1] Hiéroglossie I : Moyen Âge latin, monde arabo-persan, Tibet, Inde, Paris, Collège de France, 2015 (colloque publié en 2019) ; Hiéroglossie II : Les textes fondateurs, Japon, Chine, Europe, Paris, Collège de France, 2016 (colloque publié en 2021) ; Hiéroglossie III : Persan et syro-araméen et les relations avec la langue arabe, Paris, Collège de France, 2018 (colloque publié en 2022) ; Hiéroglossie IV : Sinoglossie, Paris, Collège de France, 2019 (actes à paraître).