Journal n°107

Imprimante 3D: la machine qui transforme le virtuel en réel

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L’Université vient de faire l’acquisition d’une imprimante 3D haut de gamme. Cette technologie révolutionnaire ouvre de nouvelles possibilités d’expérimentations aux chercheurs.

En début d’été, l’Université a fait l’acquisition d’une imprimante 3D haut de gamme de dernière génération. Installée dans un local du Centre universitaire d’informatique (CUI) à Battelle, elle est à la disposition de tous les chercheurs de l’Université. Inventé dans les années 1950, le principe de l’impression 3D repose sur l’idée assez simple d’ajouter de la matière par couches, plutôt que d’en retirer, pour fabriquer un objet. La technologie a trouvé ses premières applications industrielles au début des années 2000, avant de se populariser. Les imprimantes actuelles, comme celle que vient d’acheter l’UNIGE, ont en effet atteint un niveau de performances qui ouvre des perspectives fascinantes pour les chercheurs, aussi bien en sciences appliquées qu’en recherche fondamentale. Pour se faire une idée du potentiel de l’impression 3D, une «journée contributive» est organisée le 28 novembre à Battelle.

C’est le professeur de la Section de biologie Michel Milinkovitch qui est à l’origine de cette acquisition. Avec le concours du professeur d’informatique Bastien Chopard, il a été rejoint par d’autres équipes des Facultés des sciences et de médecine ainsi que par le SIB Institut suisse de bioinformatique qui ont mis en commun des ressources pour l’achat de l’imprimante, avec le soutien du rectorat.

La principale caractéristique de ce nouvel outil est de pouvoir utiliser simultanément jusqu’à trois résines (parmi plusieurs dizaines disponibles) de natures très différentes pour la construction d’une même pièce, l’une solide et opaque, l’autre transparente et une troisième plus souple, par exemple. Chacun de ces composants peut être finement dosé. Il est ainsi possible d’obtenir des matériaux composites plus ou moins rigides et plus ou moins transparents. La taille des objets fabriqués est limitée à environ 30 cm x 20 cm x 20 cm pour ce qui est de la machine installée au CUI.

Cailloux intelligents

Pour les chercheurs, l’impression 3D offre l’avantage de pouvoir fabriquer des prototypes sur mesure, de tester une pièce et, si elle s’avère répondre aux attentes, de la reproduire à un nombre limité d’exemplaires. L’équipe du professeur Chopard collabore ainsi avec des chercheurs de la Section des sciences de la Terre et de l’environnement et de la Haute école du paysage, d’ingénierie et d’architecture de Genève pour envisager de nouvelles approches pour l’analyse de glissements de terrain reproduits dans un laboratoire. A l’aide de l’imprimante 3D, les chercheurs peuvent fabriquer des grains de sable et des cailloux creux dans lesquels ils placent ensuite des accéléromètres et des senseurs. Une fois intégrés au terrain, ces «cailloux intelligents» permettent de lire la trajectoire du glissement. Dans cette expérience, l’impression 3D offre la possibilité de fabriquer les pièces en petite quantité, afin de tester si l’idée est bonne, et de retravailler la configuration du caillou si cela s’avère nécessaire. «C’est pour cette raison que l’on parle de nouvelle révolution industrielle à propos de l’impression 3D», observe Michel Milinkovitch. La production industrielle classique est en effet inadaptée à la fabrication rapide d’objets complexes en nombre limité.

Cette capacité d’expérimenter à partir d’objets en grandeur nature ouvre d’innombrables possibilités dans le domaine médical. Les chirurgiens peuvent désormais se préparer à une opération à l’aide d’une reproduction de l’organe d’un patient obtenue par l’intermédiaire d’une image de scanner. Par ailleurs, certaines résines sont aujourd’hui biocompatibles, permettant la fabrication de véritables prothèses personnalisées. Sans parler de l’apport constitué par la mise à disposition d’organes et de molécules 3D sur le plan pédagogique. «Il y a également toutes sortes d’aspects pratiques dans les recherches fondamentales que nous effectuons, ajoute Michel Milinkovitch. Nous essayons par exemple de mieux connaître le phénomène de craquage de la peau hyperkératinisée. L’impression 3D nous permet de passer de la simulation numérique dans un ordinateur à la simulation physique dans le monde réel. Nous pouvons également imprimer des objets digitalisés avec le scanner 3D développé dans notre laboratoire.»

Traduire une idée en objet

Le fait de pouvoir traduire facilement et rapidement une idée ou sa représentation virtuelle sur un écran en une réalisation matérielle est certainement ce qui fait la grande force de l’impression 3D. Les chercheurs de l’UNIGE s’intéressent notamment aux applications dans le domaine de la robotique. «Nous ne sommes désormais plus limités par des contraintes liées à l’existence de composants sur le marché, explique Bastien Chopard. On peut, par exemple, imaginer un robot muni d’un bras d’une forme tout à fait nouvelle et le réaliser avec l’imprimante, ce qui peut s’avérer laborieux par des techniques conventionnelles.»

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Daniel.Agulleiro(at)unige.ch