Journal n°93

Les droits de l'enfant font leur niche à l'Université

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Avec la mise sur pied du Centre interfacultaire en droits de l’enfant, l’Université de Genève intègre les compétences dans ce domaine de l’Institut universitaire Kurt Bösch

En signant une convention cadre avec l’Institut Kurt Bösch, le 2 septembre dernier, l’Université de Genève élargit ses horizons, à double titre. L’intégration d’une partie de l’Institut Kurt Bösch (IUKB) lui permet de disposer d’un site à Sion et surtout d’élargir son expertise dans les droits humains à un champ nouveau du droit, de la psychologie, de la sociologie et des sciences de l’éducation. Cette expertise est incarnée par la création toute récente du Centre interfacultaire en droits de l’enfant, qui reprend les activités de recherche menées dans ce domaine par l’IUKB. Entretien avec son directeur ad interim, Philip Jaffé, professeur de psychologie.

Après avoir été indépendant, pourquoi l’Institut Kurt Bösch rejoint-il l’UNIGE?

Philip Jaffé: Lorsqu’il a été lancé en 1992, l’Institut prodiguait des formations continues de haut niveau mais l’offre était trop hétéroclite. En 2006, la refondation de l’Institut a conduit un recentrage sur deux domaines complexes et multidimensionnels : les droits de l’enfant et le tourisme. Avec l’aide des universités, nous avons mis sur pied des filières master, les rangs de ses professeurs et assistants se sont étoffés, et les volées d’étudiantes sont allées en augmentant. Nous avons réussi à ciseler un véritable joyau académique très productif. Lorsque les autorités fédérales ont décidé de regrouper les instituts indépendants avec les universités, l’intégration s’est révélée incontournable. Les droits de l’enfant faisant partie du champ thématique plus général des droits humains, un des axes prioritaires de l’UNIGE, son Rectorat a suscité et conduit un rapprochement qui fait pleinement sens.

Que change concrètement pour vous cette opération?

Elle va créer une nouvelle dynamique. Aussi valeureux que soient nos enseignants et chercheurs, nous étions relativement isolés à Sion. En rejoignant l’UNIGE, nous bénéficions d’une aura académique bien supérieure, susceptible de mieux valoriser nos activités. Le fait que nous comptions quatre facultés «marraines» est également un gage pour renforcer le caractère interdisciplinaire de notre champ d’expertise et pour mieux disséminer nos recherches.

L’enfant a d’abord été un sujet d’étude en psychologie et en sciences de l’éducation. Aujourd’hui, d’autres disciplines s’emparent de cette thématique…

L’enfant en lui-même est un sujet interdisciplinaire par excellence. Justice juvénile, scolarité, santé pédiatrique, l’enfant en tant qu’enjeu idéologique et politique… Les angles de recherche sont multiples. Aucune des facultés de l’UNIGE ne pouvait jusqu’alors aborder seule l’enfant dans toute sa complexité. A l’avenir, nous construirons une plateforme au sein de laquelle nous susciterons des collaborations avec des collègues de tous les horizons disciplinaires.

En tant qu’objet d’étude, l’enfant a subi une transformation étonnante…

En un peu plus d’un siècle! Avec Piaget, l’enfant est envisagé de manière qualitativement différente de l’adulte. Sur le plan juridique, l’enfant est également passé du statut d’objet à celui de sujet ayant des droits et devant être protégé d’abus de toutes sortes. Aujourd’hui, on considère qu’il jouit de droits inhérents à sa personne qu’il a le droit d’exercer indépendamment des adultes qui l’entourent. Il a le droit de s’exprimer, et la société est légalement tenue de l’écouter, voire même de respecter sa parole. Comment notre société met-elle en place les droits de l’enfant, comment l’enfant lui-même participe-t-il à cette démarche? Par ailleurs, l’enfant est à la confluence d’enjeux importants comme l’évolution de la famille, le mouvement en faveur d’un droit à l’enfant (adoption gay, gestation pour autrui, clonage), ou encore des exigences protectrices toujours accrues.

Quels axes de recherche entendez-vous privilégier?

Nous cherchons à comprendre comment l’enfant lui-même opère un changement dans son environnement socio-légal, comment il participe à la transformation du monde institutionnel et des règles qui le concernent. Quelles compétences évolutives sont prises en compte? Quelles capacités sont à la disposition de l’enfant acteur? Quelle participation sociale convient-il de lui accorder? Tout en étant des académiques, nous souhaitons adopter une posture ouverte sur des questions d’actualité et nous nous sommes fixé l’objectif de réussir le dialogue entre les disciplines pour mieux répondre à ces questions. Peut-être pourrons-nous aussi participer à la fédération des collègues de l’UNIGE autour d’une réflexion sur l’interdisciplinarité elle-même.

La semaine des droits humains
Mardi 7 octobre, 18h ‒ Uni Dufour

Remise du prix Martin Ennals pour les défenseurs des droits humains

Mercredi 8 octobre, 18h30 ‒ Uni Dufour

Conférence publique «L’enfant et le génocide», par Adama Dieng, conseiller spécial du secrétaire général des Nations unies pour la prévention du génocide

Mercredi 8 et jeudi 9 octobre ‒ Uni Mail, sur inscription

Colloque scientifique «Droits de l’enfant vs droits à l’enfant »

Jeudi 9 octobre, 17h30 ‒ Uni Mail

Célébration des 25 ans de la Convention de l’ONU relative aux droits de l’enfant

vendredi 10 octobre, 10h ‒ Uni Dufour

Cérémonie du Dies academicus de l’UNIGE (lire page 5)

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