1er juin 2022 - UNIGE

 

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Le Soleil tourne à nouveau rond

Une équipe internationale menée par des scientifiques de l’UNIGE est parvenue à élaborer un modèle pour résoudre une partie du «problème solaire».

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Le modèle développé par les scientifiques inclut l’historique de la rotation du soleil mais aussi les instabilités magnétiques que celle-ci génère. Image: S. Ekström/UNIGE


Rien n’allait plus dans le Soleil! Au début des années 2000, les abondances des éléments chimiques de sa surface ont été revues à la baisse, empêchant les astrophysicien-nes de réconcilier les valeurs prédites par leur modèle standard avec ces nouvelles données. Mises en doute, ces abondances tiennent pourtant bon malgré plusieurs nouvelles analyses. Il faudra donc faire avec et ce sera aux modèles solaires d’évoluer, d’autant qu’ils servent de référence à l’étude des étoiles en général. Une équipe menée par Patrick Eggenberger, maître d’enseignement et de recherche au Département d’astronomie (Faculté des sciences), en collaboration avec l’Université de Liège, a développé un nouveau modèle théorique qui permet de résoudre une partie du problème: en prenant en compte la rotation du Soleil qui a varié au cours du temps et les champs magnétiques qui en découlent, les scientifiques ont démontré qu’il était possible d’expliquer sa structure chimique. Ces résultats sont à découvrir dans Nature Astronomy.

«Le Soleil est l’étoile que l’on peut caractériser le mieux. Il constitue ainsi un test fondamental pour notre compréhension de la physique stellaire. Nous disposons de mesures d’abondances de ses éléments chimiques, mais aussi de mesures de sa structure interne comme pour la Terre grâce à la sismologie», explique Patrick Eggenberger.
Ces observations doivent évidemment coïncider avec les prédictions des modèles théoriques qui tentent d’expliquer son évolution. Comment le Soleil brûlera-t-il l’hydrogène en son cœur, comment l’énergie qui y est produite sera transportée vers les couches externes, comment les éléments chimiques se déplacent-ils sous l’effet de la rotation et des champs magnétiques?

 

Le modèle standard du Soleil

«Le modèle solaire standard utilisé jusqu’à maintenant considère notre étoile sous une forme simplifiée, d’une part en ce qui concerne le transport des éléments chimiques dans ses couches les plus profondes, d’autre part pour sa rotation et ses champs magnétiques internes entièrement négligés jusque-là», souligne Gaël Buldgen, chercheur au Département d’astronomie de l’UNIGE et co-auteur de l’étude.
Tout cela fonctionnait pourtant de manière satisfaisante jusqu’au début des années 2000, lorsqu’une équipe scientifique internationale révise drastiquement les abondances solaires en fournissant une analyse plus fine. Ces nouvelles abondances ont jeté un gros pavé dans la mare des modélisations solaires. Dès lors, plus aucun modèle ne parvenait à reproduire les données obtenues par l’héliosismologie, soit l’étude des vibrations du Soleil, en particulier l’abondance d’hélium dans l’enveloppe du Soleil.

 

Nouveau modèle

Le nouveau modèle élaboré par l’équipe de l’UNIGE inclut non seulement l’historique de la rotation elle-même, sans doute plus rapide dans le passé, mais également les instabilités magnétiques qu’elle génère. «On doit absolument prendre en compte simultanément les effets de la rotation et des champs magnétiques sur le transport des éléments chimiques dans nos modèles stellaires. C’est important pour le Soleil comme pour la physique générale des étoiles, avec un impact direct sur l’évolution chimique de l’Univers étant donné que les éléments chimiques si importants pour la vie sur Terre sont fabriqués dans le coeur des étoiles», précise Patrick Eggenberger.
Le nouveau modèle parvient non seulement à prédire correctement la concentration d’hélium dans les couches externes du Soleil mais également celle du lithium qui, lui aussi, résistait à la modélisation jusqu’à présent. «L’abondance en hélium est correctement reproduite par le nouveau modèle car la rotation interne du Soleil imposée par les champs magnétiques engendre un mélange turbulent qui empêche cet élément de tomber trop rapidement vers le centre de l’étoile; simultanément, l’abondance du lithium observée à la surface solaire est également reproduite car ce même mélange le transporte vers les régions chaudes où il est détruit», explique Patrick Eggenberger.

 

Problème pas entièrement résolu

Tous les défis posés par l’héliosismologie ne sont cependant pas résolus par le nouveau modèle: «Grâce à l’héliosismologie, nous connaissons avec une précision redoutable, à 500 km près, la région où commence les mouvements convectifs de matière, à 199 500 km sous la surface du Soleil. Or les modèles théoriques du Soleil prédisent une profondeur en décalage de 10 000 km!» explique Sébastien Salmon, chercheur à l’UNIGE et co-auteur de l’article. Si le problème existe toujours avec le nouveau modèle, il ouvre une nouvelle porte de compréhension: «Grâce au nouveau modèle de ce travail, nous mettons en lumière les processus physiques pouvant nous aider à résoudre ce désaccord critique.»
«Nous allons devoir réviser les masses, rayons et âges obtenus pour les étoiles de type solaire que l’on a étudiées jusqu’à présent», souligne Gaël Buldgen en détaillant les prochaines étapes. En effet, dans la grande majorité des cas, on transpose la physique solaire aux cas d’études proches du Soleil. Par conséquent, si les modèles pour analyser le Soleil sont modifiés, cette mise à jour doit également être effectuées pour les autres étoiles similaires à la nôtre.
Patrick Eggenberger précise: «Ceci est particulièrement important si l’on veut mieux caractériser les étoiles hôtes de planètes, par exemple dans le cadre de la mission PLATO.» Cet observatoire de 24 télescopes devrait s’envoler vers le point de Lagrange 2 (à 1,5 million de kilomètres de la Terre, à l’opposé du Soleil) en 2026 pour découvrir et caractériser des petites planètes, et affiner les caractéristiques de leur étoile-hôte.

 

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