«Lors de la votation sur l’expérimentation animale tenue à Genève en novembre 2019, des étudiant-es m’ont questionné sur l'utilité de cette pratique dans le cadre de la formation, explique Aurélien Roux. Je me suis aperçu que leur argumentation était en partie basée sur des éléments factuels erronés, puisés dans des médias ou parmi leurs proches.» Pour le biochimiste, ce déficit d’information scientifique met en évidence une lacune dans la formation universitaire. Comment dès lors faire en sorte que les étudiant-es soient capables de déployer des arguments rationnels et fondés sur des données solides, lorsqu’elles et ils seront appelé-es à se prononcer, en tant que citoyen-nes, sur des choix de société cruciaux ou à s’exprimer publiquement sur ces questions?

 

Aurélien Roux. Photo: DR

Pour tenter de combler cette lacune, Aurélien Roux et ses collègues ont mis en place un projet de cours utilisant le débat comme outil pédagogique afin d’apprendre aux étudiant-es à utiliser le raisonnement scientifique dans le cadre de sujets de société sur des questions comme le changement climatique, la perte de biodiversité, les nouveaux médicaments, mais aussi les recherches biotechnologiques destinées à éviter l'utilisation d'animaux dans le cadre industriel, expérimental ou éducatif. Chaque thématique est abordée en deux temps, dans une perspective pédagogique innovante. Une présentation effectuée par un-e enseignant-e de l’Université permet d’abord d’expliquer les raisonnements et les données sur lesquels se fondent les avis scientifiques, puis un débat fait intervenir deux expert-es de thématiques différentes. Par exemple, un-e  démographe et un-e climatologue sont invité-es à débattre du rôle de la démographie humaine dans le réchauffement climatique ou la perte de biodiversité.

 

Développer des compétences d'écoute

«Notre objectif est de développer auprès des étudiant-es des compétences d’écoute, précise Aurélien Roux. Même lorsqu’une personne avance des idées qui peuvent paraître choquantes, il est primordial de savoir écouter les arguments de son interlocuteur/trice pour évaluer son raisonnement et y répondre de manière adéquate. Nous visons également à ce qu’elles et ils apprennent à exprimer leur point de vue de manière claire, tout en acceptant la possibilité de ne pas avoir toujours raison et que des personnes qui, a priori, ne partagent par les mêmes opinions qu’elles et eux puissent exprimer des arguments valables.»

Ce cours, intitulé «Sciences de la vie et société», devrait idéalement être proposé dès la première année d’études. Il a démarré cette année au sein d’un cours de biochimie de 2^e année bachelor mais ses concepteurs ambitionnent qu’il devienne un enseignement à part entière, parallèlement aux formations déjà proposées dans le domaine de l’éthique scientifique.