16 mai 2024 - Léa Jacquat

 

Vie de l'UNIGE

Un jeu de cartes pour contrer les biais à l'embauche

La Commission égalité et diversité de la Faculté des sciences a créé un jeu de cartes recensant les biais inconscients qui peuvent rejaillir sur la vie académique, notamment les processus de recrutement des professeur-es.


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Les biais inconscients sont nombreux dans les processus de recrutement. Le jeu de cartes développé suscite questionnements et discussions. Image: DR


Rendre le processus d’embauche plus inclusif pour les professeur-es au sein de la Faculté des sciences: tel est l’objectif de la Commission égalité et diversité de la Faculté avec le projet «A Mindful Memo». Afin d’encourager une prise de conscience sur les biais inconscients qui interviennent sur le genre, en particulier dans les processus de recrutement, une équipe a imaginé un jeu de cartes créatif et interactif.


Évincer une candidate à cause des conséquences d’une potentielle grossesse, penser que ses capacités de leadership sont inférieures à celles d’un homme: les biais inconscients sont nombreux dans les processus de recrutement. Si ces raccourcis mentaux font partie intégrante du fonctionnement cérébral chez l’être humain et permettent de trier un important volume d’informations, ils ont aussi des effets néfastes sur nos prises de décisions, ce qui peut se répercuter sur la représentativité des femmes dans les postes de recherche et d’enseignement. À l’UNIGE, 40% des postes de professeur-es assistant-es sont occupés par des femmes, mais elles ne représentent plus que 17% des professeur-es ordinaires. Cette tendance, appelée «leaky pipeline», est un phénomène largement étudié et observé dans de nombreuses institutions.

«Afin de prendre en compte la multidimensionnalité des carrières académiques, il est important de considérer le CV, en plus du nombre de publications dans des revues scientifiques. Cependant, de nombreux a priori peuvent apparaître lors de leur lecture», affirme la professeure Costanza Bonadonna, doyenne de la Faculté des sciences et impliquée dans ce projet. Afin que ces préjugés prennent moins de place dans les commissions de sélection des professeur-es, un comité s’est basé sur des études scientifiques et s’est entouré d’expert-es pour sélectionner les biais les plus proéminents associés avec l’évaluation des CV.

Souhaitant rendre le projet le plus interactif et accessible possible, l’équipe a fait appel à une agence de conseil stratégique et créatif afin d’imaginer des cartes numériques. Le jeu élaboré sur cette base est transmis à chaque membre des commissions de sélection avant qu’ils et elles n’étudient les CV reçus. Les membres se rendent sur le site internet et prennent ainsi connaissance des cartes, qui représentent chacune un biais différent. Elles sont munies d’une double illustration, illustrant la différence entre le visible et l'imaginaire. Pour approfondir, les cartes peuvent être retournées et offrent de plus amples informations sur chacun des biais.

Un futur plus inclusif pour les universités

Lorsque les commissions de sélection se rencontrent, les cartes suscitent des questionnements et engendrent des discussions. «Cette prise de conscience ne constitue pas seulement une opportunité d’améliorer la représentativité des femmes, c’est une nécessité pour créer un futur de l’université plus riche, reflétant sa diversité. Les professeur-es restent parfois en poste pendant plus de trente ans. Améliorer les processus de recrutement maintenant, c’est assurer un futur plus inclusif et dynamique», affirme le professeur Sylvain Sardy, coprésident de la Commission.

Prendre conscience de ses capacités

À l’avenir, la Commission égalité et diversité souhaite également diffuser ces cartes aux autres membres de la Faculté et à la communauté de l’UNIGE dans son ensemble, y compris aux étudiant-es. En effet, le manque de représentativité des femmes dans la science a également un impact sur les biais des jeunes chercheuses. «Les exemples de femmes à des postes importants étant rares, elles les considèrent comme inaccessibles et tendent à sous-évaluer leurs propres capacités», explique la chargée de cours Virginie Hamel, coprésidente de la commission. Cette dernière espère que cette initiative encouragera les femmes à briguer des postes plus élevés.

A Mindful Memo n’en est pour l’heure qu’à sa genèse. Au-delà d’une diffusion plus large, la Commission souhaite notamment travailler sur d’autres biais influençant le jugement sur la sélection des candidat-es: ceux touchant à l’ethnicité, à l’âge, aux capacités physiques, à la religion ou encore à l’orientation sexuelle.

 

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