18 octobre 2022 - Jacques Erard

 

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Laurence Boisson de Chazournes fait son entrée au Collège de France

 

 

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Laurence Boisson de Chazournes. Photo: UNIGE

 

Professeure à la Faculté de droit et à la Faculté de traduction et d’interprétation, Laurence Boisson de Chazournes a été invitée au Collège de France pour l’année académique 2022-2023. Elle y occupera la chaire annuelle Avenir commun durable. Cette élection souligne son apport pionnier dans le domaine de la gestion des ressources naturelles, et en particulier l’eau douce.

 

Ressource à la fois indispensable à la vie et existant en quantité finie, l’eau douce se raréfie à mesure que la population humaine augmente et que les dégradations et dérèglements environnementaux pèsent sur les systèmes aquifères. Depuis son passage au sein de la Banque mondiale entre 1995 et 1999, Laurence Boisson de Chazournes a œuvré à la compréhension et au développement des multiples facettes du droit international concernant l’eau douce et ses usages.

Longtemps considérée comme une ressource inépuisable, l’eau a fait irruption dans le droit international à la fin du XIXe siècle, compte tenu de l’importance croissante accordée aux voies fluviales comme lignes de partage entre les nations et pour les échanges commerciaux. Les mutations économiques et sociales du XXe siècle entraînent ensuite une multiplication des usages industriels, agricoles et énergétiques liés à l’eau douce. Mais la véritable prise de conscience de la vulnérabilité de la ressource date de la fin du siècle. Dans la foulée de la Conférence de Rio en 1992, les juristes commencent en effet à s’intéresser à la question des inégalités d’accès à l’eau et à ses implications à la fois économiques et environnementales mais aussi humaines et diplomatiques.

 

L'eau comme arme de guerre

Aujourd’hui, l’eau est également devenue une cible pour les belligérants qui, en s’attaquant à l’approvisionnement, cherchent à fragiliser les populations civiles, comme on le constate aujourd’hui en Ukraine. Selon des estimations de l’Unicef, en avril 2022, les attaques contre les infrastructures hydrauliques ont privé d’eau courante 1.4 million de personnes dans l’est du pays.

Afin de faire converger ces multiples facettes dans une vision juridique intégrée, Laurence Boisson de Chazournes a créé en 2009  la Plateforme pour le droit international de l’eau douce. Cette structure, inédite sur le plan international, a servi de creuset à de nombreuses recherches menées par une équipe d’une dizaine de chercheurs et chercheuses. Ces travaux ont profilé Genève comme un centre d’importance mondiale dans le domaine du droit international de l’eau, qui s’est renforcé en 2014 avec la création, en partenariat avec la Confédération et la Direction du développement et de la coopération (DDC), du Geneva Water Hub. Cet organisme, auquel la Plateforme pour le droit international de l’eau douce est depuis intégrée, a pour vocation d'agir en amont des conflits liés à l’eau dans un but de prévention et afin de promouvoir la protection de cette ressource comme un instrument de paix et de coopération.

Au cours des conférences et séminaires qu’elle donnera dans le cadre de son enseignement au Collège de France, Laurence Boisson de Chazournes dressera un panorama large du droit applicable aux ressources en eau.  «Il n’existe pas encore une lecture totalement cohérente du droit international de l’eau, estime la professeure. Il devient pourtant de plus en plus impératif que les États se dotent d’une politique de l’eau conçue en termes de relations internationales. Des différends sont régulièrement portés devant des mécanismes diplomatiques et juridictionnels.» Pour réfléchir à ces questions, des invité-es participeront aux séminaires. Il s’agit de Mark Zeitoun, professeur et directeur du Geneva Water Hub, de Pedro Arrojo-Agudo, rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement du Conseil des droits de l’homme, de Tamsir Ndiaye, directeur général de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal, de Ximena Fuentes, professeure et vice-ministre des Relations extérieures du Chili, et de Mara Tignino, maître d’enseignement et de recherche à la Faculté de droit/UNIGE et juriste principale au Geneva Water Hub.

Laurence Boisson de Chazournes donnera sa conférence inaugurale le 12 janvier prochain. Un colloque consacré au droit international de l’environnement clôturera cette session le 12 mai 2023. Elle est l’auteure de nombreux ouvrages, parmi lesquels Fresh Water in International Law, dont une deuxième édition a été publiée en 2021.

 

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Distinctions (de 2012 à 2020)