24 novembre 2022 - Alexandra Charvet
Bousbir, entre imaginaire exotique et violence de genre
Une exposition retrace l’histoire de Bousbir, l’ancien quartier réservé de Casablanca, actif de 1923 à 1955, et interroge la place matérielle et symbolique des travailleuses du sexe dans les villes.
Photomontage réalisé sur une carte postale de Bousbir, Marcelin Flandrin, Casablanca, fin des années 1930. Les images des travailleuses du sexe dans les médaillons sont tirées de cartes postales du même éditeur. Image: DR
Depuis quelques jours, une porte monumentale se découpe sur les vitrines du bâtiment sis au 66 boulevard Carl-Vogt. L’image reproduit la porte de Bousbir, l’ancien «quartier réservé» de Casablanca. Construite par des architectes français en 1932, elle constituait le seul accès à cette zone fermée par un mur aveugle ne laissant rien deviner de ce qui se passait à l’intérieur. De style néo-mauresque, la reproduction intrigue et invite à découvrir la nouvelle exposition du Département de géographie et environnement.
Intitulée «Quartier réservé», du nom donné à la zone où le commerce du sexe (prostitution, sex-shops, spectacles érotiques, etc.) se concentre dans certaines villes, l’exposition présente Bousbir, l’ancien quartier «chaud» de Casablanca, actif de 1923 à 1955. Construite sur ordre de l’administration du Protectorat français pour «nettoyer» Casablanca et encadrer la prostitution, cette portion de la ville était une immense maison close à ciel ouvert où exerçaient, dans des conditions proches du travail forcé, 400 jeunes filles, maures pour la plupart. Unique au monde par sa taille et son décor évoquant Les Mille et Une Nuits, Bousbir fut vite l’objet de nombreux reportages et cartes postales, devenant bientôt la principale attraction touristique de Casablanca.