Journal n°106

Une cité engloutie de l’âge du bronze découverte en Grèce

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Des archéologues genevois ont repéré des fortifications et des vestiges de bâtiments datant du IIIe millénaire avant l’ère chrétienne sous les eaux du golfe de Nauplie, au Péloponnèse

Ils étaient venus dans la baie de Kiladha, au Péloponnèse, pour débusquer le plus ancien village d’Europe, vieux d’au moins 8000 ans. A la place, ils sont tombés au cours du mois d’août dernier sur une cité totalement inconnue datant du début de l’âge du bronze (IIIe millénaire avant l’ère chrétienne) et engloutie à 2 ou 3 mètres de profondeur. C’est moins ancien, mais plus impressionnant. En tout cas, Julien Beck, chargé de cours au Département des sciences de l’Antiquité (Faculté des lettres) – et responsable des fouilles réalisées sous l’égide de l’Ecole suisse d’archéologie en Grèce en collaboration avec le Service grec des antiquités sous-marines –, ne boude pas son plaisir: «Nous avons repéré un système de fortifications massives d’un genre encore inconnu en Grèce pour la période, de nombreux bâtiments et des milliers d’objets, dont des vases et des outils. Ces découvertes obligent à reconsidérer l’histoire grecque de cette région et à cette époque.»

«Terra Submersa»

La campagne de fouille a commencé l’été dernier avec l’expédition «Terra Submersa», au cours de laquelle les archéologues genevois ont sondé la baie de Kiladha, en face de la grotte de Franchthi, à bord du bateau solaire PlanetSolar. Durant leur séjour, les chercheurs ont aussi plongé au large de la plage voisine de Lambayanna. C’est là qu’ils ont repéré pour la première fois des murets submergés à faible profondeur.

Intrigués, les archéologues y sont retournés cet été et, après les premières prospections, c’est tout un établissement côtier fortifié d’au moins 1,2 hectare qui leur est apparu: des bâtiments à plan rectilinéaire, circulaire et absidal, des tronçons d’un mur de fortification extérieur relié aux fondations d’au moins trois grandes structures en pierres en forme de fer à cheval de 18 mètres sur 10 et espacées de 50 à 60 mètres les unes des autres. Ces dernières, selon Julien Beck, sont probablement les vestiges de tours. «Ce qui est sûr, précise le chercheur, c’est que ces constructions sont d’une taille inconnue ailleurs en Grèce au début de l’âge du bronze.»

Eclairage nouveau

Les recherches futures à Lambayanna devraient apporter un éclairage nouveau sur un réseau dense d’établissements côtiers déjà connus dans le golfe de Nauplie et datant de la même époque tels que Lerne, Tirynthe et Asiné. Elles serviront à mieux comprendre le mode d’occupation, les échanges et les activités maritimes au cours de la préhistoire.

Village néolithique

Par ailleurs, Julien Beck et son équipe n’ont pas perdu de vue l’objectif initial de leur mission, à savoir la découverte d’un village plus ancien encore, aujourd’hui submergé, et qu’ils pensent pouvoir situer en contrebas de la grotte de Franchthi. Ce site a en effet été occupé durant près de 35 000 ans, du Paléolithique au Néolithique, une période durant laquelle le niveau de la mer a considérablement varié.

L’identification et l’étude de cet hypothétique village néolithique permettraient notamment de mieux comprendre la propagation de l’agriculture du Proche-Orient vers l’Europe.