Journal n°145

Plaidoyer pour un islam libéral

image-3.jpgQuelles sont les conditions d’un islam partenaire plutôt que concurrent des sociétés occidentales et libérales? Yadh Ben Achour, juriste tunisien, docteur honoris causa de l’UNIGE en 2017, et François Dermange, professeur à la Faculté de théologie et directeur du programme de formation pour les imams proposé par l’Université de Genève (lire ci-dessus),  répondent à cette question dans un ouvrage à quatre mains*. «Le seul langage commun susceptible de rendre possible la cohabitation est celui de l’autonomie personnelle, de la sécularisation, de la démocratie et de l’état de droit.» Pour Yadh Ben Achour, le dialogue passe en d’autres termes par l’accession de l’islam en Occident à la modernité, qui implique la reconnaissance de la primauté des droits universels sur les considérations personnelles. Mais cet effort d’adaptation au sens fort ne va pas sans «contrepartie». Les sociétés occidentales doivent poursuivre leur lutte contre le rejet
au nom d’une conception étriquée de l’identité culturelle. La communauté musulmane et la société d’accueil auraient ainsi tout à gagner à ce que la première devienne «une force intellectuelle qui contribue à la gestion des affaires de la cité moderne et à la conception de l’avenir de la société occidentale». Après un examen des principales dynamiques, républicaine, libérale et identitaire, à l’œuvre dans le développement des sociétés occidentales, François Dermange se montre plus prudent, faisant appel à la sagesse pratique et à une juste pesée des intérêts entre l’attachement à l’égalité des droits, la conception commune que les citoyens se font de leur société et leurs convictions personnelles. Dans cet exercice d’équilibre, il revient, selon lui, au politique de jouer le rôle d’arbitre.

* Quel islam pour l’Europe? par Yadh Ben Achour et François Dermange, Labor et Fides éd., 2017