6 octobre 2025 - UNIGE

 

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Trente ans d’exoplanètes à l’UNIGE

Le 6 octobre 1995, Michel Mayor et Didier Queloz, alors respectivement professeur et doctorant au Département d’astronomie, annonçaient la détection de la première planète en orbite autour d’une étoile autre que le Soleil. Cette découverte leur a valu, en 2019, l’attribution du prix Nobel de physique.

 

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Vue d’artiste de l’exoplanète 51 Pegasi b de type Jupiter chaud, en orbite autour d’une étoile située à quelque 50 années-lumière de la Terre dans la constellation boréale de Pégase (Le Cheval Ailé). ESO/M. Kornmesser/Nick Risinger

 

Plus de 5000 exoplanètes ont été identifiées à la suite de la découverte de la première exoplanète, 51 Pegasi b. Le Département d’astronomie de la Faculté des sciences, et plus particulièrement son Centre pour la vie dans l’Univers, s’est spécialisé dans ce domaine. L’UNIGE marque cet anniversaire par la remise de sa médaille de l’innovation au Département d’astronomie lors du Dies academicus, le 10 octobre.


Premiers soupçons

Dès le milieu du XXe siècle, les astronomes soupçonnent que les systèmes planétaires trouvent leur origine lors de la formation des étoiles elles-mêmes. Si tel est le cas, notre Galaxie devrait abriter des centaines de milliards de mondes. Encore faut-il trouver le moyen de les détecter.

À partir des années 1970, une méthode novatrice développée à l’Observatoire de Genève permet une mesure précise des variations minimes de la vitesse des étoiles. Or, la présence d’une planète, même de petite taille, crée de légères oscillations de vitesse de son étoile hôte. Une décennie plus tard, Michel Mayor et André Baranne, un ingénieur opticien français, se lancent dans la conception d’un nouvel instrument destiné au télescope de 2 mètres de l’Observatoire de Haute-Provence dans le sud de la France. Ce dispositif, dont la précision dépasse toutes les attentes, allait se révéler décisif en ouvrant la voie à la détection de planètes géantes comparables à Jupiter.

 

Un fax qui change tout

Tout s’accélère lorsqu’en octobre 1993, Michel Mayor dépose une demande ambitieuse: obtenir une semaine d’observation tous les deux mois, soit 42 nuits de télescope par an, pour partir à la recherche d’exoplanètes. En dépit d'une vive compétition, sa requête est acceptée. Son doctorant de l’époque, Didier Queloz, le rejoint et les deux astronomes décident dès lors de se focaliser sur 142 étoiles comparables à notre Soleil.

À la fin de l’année 1994, Didier Queloz, qui menait les observations de ce programme «exoplanètes», envoie un fax à Michel Mayor, alors en déplacement à l’Institut d’astronomie de l'Université d’Hawaii: «Une étoile présente des variations qui apparaissent périodiques, avec une période de seulement 4,2 jours. Qu’en penses-tu?»

La variation constatée pour le signal de 4,2 jours correspondrait à une planète dont la masse équivaudrait à la moitié de celle de Jupiter. Pourtant, selon les modèles établis, les planètes géantes se forment loin de leur étoile, sur des orbites dont la période se compte en dizaines d’années — à l’image de Jupiter ou de Saturne dans notre propre système solaire. Michel Mayor est donc prudent.

Les deux astronomes doivent attendre juillet 1995 pour que l’étoile soit à nouveau visible dans le ciel du sud de la France. De nouvelles mesures sont effectuées et permettent, cette fois, de conforter l’hypothèse planétaire. Les résultats sont publiés dans la prestigieuse revue Nature et l’annonce officielle est faite lors d’une conférence à Florence le 6 octobre 1995. Cette découverte historique vaudra à Michel Mayor et Didier Queloz le prix Nobel de physique en 2019.

 

Rester compétitif

L’effervescence autour de la découverte de 1995 a permis d’ancrer solidement la recherche sur les exoplanètes à l’Université de Genève et en Suisse. En 2014, le Fonds national suisse de la recherche scientifique octroie ainsi à l’UNIGE et à l’Université de Berne un Pôle de recherche national dédié à la recherche sur les planètes, PlanetS.

En 2018, sous la direction du professeur Francesco Pepe, le spectrographe le plus précis du monde, Espresso, est installé sur le mont Paranal dans le désert d’Atacama. Cet instrument atteint une sensibilité de 10 cm/sec qui lui permet de détecter des planètes dotées de masses similaires à celle de la Terre. En 2023, sous la direction du professeur François Bouchy, le spectrographe Nirps est installé aux cotés de Harps pour traquer les exoplanètes dans l’infrarouge.

Pour rester compétitive et continuer à repousser les limites de la connaissance humaine, l’UNIGE travaille d’ores et déjà sur de nouveaux projets: Ristretto, par exemple, qui doit permettre d’observer la lumière de l’exoplanète la plus proche de la Terre autour de l’étoile Proxima du Centaure. Ristretto va par ailleurs servir de prototype à un projet de télescope géant de 39 mètres de diamètre prévu par l’ESO (European Southern Observatory). À travers son Centre pour la vie dans l’Univers, l’UNIGE se profile également dans la recherche de la vie ailleurs que sur Terre, par le biais d’une approche transdisciplinaire.

 

 

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