Journal n°77

Le multilinguisme: toujours gagnant

Plutôt que de se focaliser sur l’anglais, la France devrait miser sur le plurilinguisme selon François Grin, professeur à la Faculté de traduction et d’interprétation et spécialiste de l’impact économique du multilinguisme

La question des langues est au cœur d’un projet de loi français visant l’introduction de l’anglais dans l’enseignement supérieur, et qui fait polémique. En se focalisant sur la question de l’anglais, nos voisins se crispent sur un faux problème, selon l’économiste des langues François Grin. «Le fait de disposer uniquement de l’anglais ne constitue plus une compétence extraordinaire, explique le professeur. Elle est monnayable sur le marché de l’emploi, mais d’autres langues peuvent rapporter autant, voire davantage, et avoir plusieurs cordes linguistiques à son arc est bien plus profitable.»
S’il y a vingt ans s’intéresser à l’économie des langues semblait marginal, la donne a changé aujourd’hui. Dans ce champ, les chercheurs mesurent l’impact des langues avec les méthodes de la micro et de la macroéconomie. L’édition du 8 mai dernier du Monde illustre l’intérêt pour cette discipline, en citant des travaux de François Grin, qui portent sur les retombées salariales de la maîtrise, par un employé, d’une ou plusieurs langues étrangères.
Le quotidien français s’y réfère au regard d’une étude américaine plus récemment réalisée en Inde, où la maîtrise de l’anglais langue étrangère, à diplôme et expérience égaux, engendrerait une rémunération supérieure d’un tiers à celle des non-anglophones. Rien de surprenant pour le professeur, qui souligne que, «désormais, sur le marché de l’emploi en Grande-Bretagne, les candidats plurilingues sont préférés aux Britanniques qui ne parlent que l’anglais».
Par ailleurs, la maîtrise de plusieurs langues favorise l’appréhension de phénomènes complexes. Elle peut aussi être positive dans le domaine financier, où la formation se fait essentiellement en anglais.