Journal n°153

Un test de compétences émotionnelles mis au point pour aider à l’embauche

image-3.jpgEn arrivant à son entretien d’embauche avec une demi-heure de retard, il ne fait aucun doute que Janice* a commis une erreur irréparable et qu’elle repartira bredouille. Pourtant, elle ressort de son rendez-vous avec le job en poche. Le calme et la maîtrise inattendues dont elle a fait preuve ont en effet emporté l’adhésion de ses examinateurs. En réalité, la jeune fille avait mal noté l’heure de son rendez-vous. Elle n’avait aucune conscience d’être en retard et pensait même avoir un peu d’avance. Si elle avait su la vérité, elle aurait paniqué et n’aurait jamais été retenue.

Cet épisode – authentique – illustre bien le côté aléatoire des procédures de recrutement traditionnelles qui, au final, débouchent le plus souvent sur une sélection « au feeling ». Un tel quiproquo ne se serait probablement pas produit si ses employeurs avaient utilisé le «Geneva Emotional Competences Test» (GECO) qui fait l’objet d’une publication récente dans le Journal of Applied Psychology.

Cet outil permet en effet d’évaluer les compétences émotionnelles au travail de manière objective et avec une plus grande valeur prédictive que la plupart des méthodes utilisées aujourd’hui

Développé par Marcello Mortillaro, adjoint scientifique au Centre interfacultaire en sciences affectives (CISA), et Katja Schlegel, chercheuse à l’Institut de psychologie de l’Université de Berne, cet outil permet en effet d’évaluer les compétences émotionnelles au travail de manière objective et avec une plus grande valeur prédictive que la plupart des méthodes utilisées aujourd’hui par les spécialistes des ressources humaines.

Le GECO comprend quatre parties permettant d’évaluer les différentes composantes de l’intelligence émotionnelle: la compréhension des émotions, leur reconnaissance, la régulation de ses propres émotions et la gestion de celles d’autrui.

Les différentes questions ont été définies à partir d’entretiens passés avec plus de 40 managers d’entreprises suisses qui ont dû décrire diverses situations dans lesquelles ils ont été confrontés à la peur, la tristesse, la colère ou la joie inappropriée. Leurs propres réponses à ces situations ont ensuite été validées par des experts des émotions, des managers ainsi que des personnes du grand public.

Plus une personne a des compétences élevées en intelligence émotionnelle, meilleurs sont ses résultats professionnels, et ce indépendamment de son intelligence cognitive ou de sa personnalité

L’évaluation du GECO par un millier de volontaires a montré que plus une personne a des compétences élevées en intelligence émotionnelle, meilleurs sont ses résultats professionnels, et ce indépendamment de son intelligence cognitive ou de sa personnalité. De plus, une meilleure capacité de réguler ses émotions est liée à un salaire un peu plus élevé.

L’intelligence émotionnelle va aussi de pair avec une plus grande empathie, une plus grande ouverture envers autrui, un respect des règles morales et globalement un tempérament positif. En appliquant le GECO à des personnes de 20 à 60 ans, les chercheurs ont remarqué que l’intelligence émotionnelle augmente avec l’âge et l’expérience, qu’il s’agit donc d’une faculté que l’on peut améliorer et développer. Par ailleurs, les femmes obtiennent majoritairement des résultats supérieurs aux hommes.

Un bon score au GECO est également associé à de meilleurs résultats dans les tâches de leadership ou académiques. C’est pourquoi GECO est aujourd’hui commercialisé par une entreprise bernoise (Nantys) et utilisé lors d’évaluations dans le cadre de recrutement ou d’orientation professionnelle. Il existe actuellement en français, anglais et allemand, mais une version italienne est en préparation.  —

* Prénom fictif