Journal n°162

L’Université veut réduire de moitié ses émissions de CO2 liées à l’avion

image-1.jpg

Participer à un colloque de génétique à Londres, mener une campagne de fouilles au cœur du pays dogon ou signer un accord de partenariat avec l’Université chinoise de Tsinghua, voilà le genre de raisons qui conduisent les collaborateurs de l’UNIGE à effectuer chaque année quelque 4000 vols en avion. Cruciale pour l’avancée de la science, la mobilité est inscrite dans l’ADN des universités dont le travail est, par essence, international. Tout en préservant cette mobilité, l’UNIGE s’engage aujourd’hui dans une politique de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre et se fixe comme objectif de diminuer de moitié ses émissions de CO2 liées au transport aérien à l’horizon 2030. Une mesure dans la lignée de celles préconisées par la communauté scientifique internationale – notamment le GIEC – pour maintenir le réchauffement global au-dessous de 2 degrés.

Pour y parvenir, l’UNIGE a élaboré une politique qui se base sur trois principes fondamentaux: informer, réduire/remplacer et compenser. Les mesures qui seront progressivement mises en place d’ici à la rentrée 2020 consistent notamment à développer la vidéoconférence, à renoncer à l’avion pour les destinations accessibles en moins de quatre heures de train ou pour des conférences sans participation active et, enfin, à compenser les émissions de carbone ne pouvant être évitées.

Vers une recherche moins émettrice de CO2

«Afin d’engager un changement de culture vers une recherche moins émettrice de CO2, il est essentiel d’informer la communauté sur l’impact environnemental du transport aérien, souligne Fabrice Calame, responsable des objectifs de développement durable au Rectorat. Un aller-retour Genève – New York en classe économique émet 2 tonnes d’équivalent CO2 par passager, soit la même quantité que 20 000 kilomètres parcourus par quatre personnes dans une voiture économique.» Pour stimuler les efforts, les entités qui auront réduit de manière notable leurs émissions seront reconnues par un processus interne de valorisation.

S’il est ambitieux de développer une telle politique dans le contexte universitaire, d’autres institutions suisses ont déjà introduit des mesures incitatives ou restrictives sans toutefois se fixer des objectifs de réduction chiffrés, comme l’ont fait l’UNIGE ou l’ETHZ. Du côté de l’État de Genève, une motion des Verts adoptée en mars dernier par le Grand Conseil demande que les voyages en avion des collaborateurs soient limités aux destinations à plus de 1200 kilomètres. «Une telle mesure est symboliquement forte mais elle pourrait provoquer, par effet rebond, une augmentation des déplacements pour les destinations lointaines et donc ne pas atteindre sa véritable cible», prévoit Fabrice Calame. C’est pourquoi, plus qu’une simple interdiction, la politique mise en place comprend plusieurs actions incitatives comme l’extension de l’offre de salles de vidéoconférence ou l’accès à la première classe pour les trajets en train de plus de quatre heures.

Nous faisons aujourd’hui le choix d’une politique pragmatique basée sur la responsabilité individuelle et collective

Le volume global des émissions issues du transport aérien à l’UNIGE est aujourd’hui estimé à 6500 tonnes d’équivalent de gaz carbonique. Si 67% des vols se font sur territoire européen, ceux-ci ne représentent que 18% des émissions. Pour mener une politique de réduction efficace, une connaissance plus précise des consommations s’avère toutefois nécessaire et l’UNIGE se dotera dès cet automne d’outils fins de suivi de sa consommation. «Cette collecte de données se fera de manière quasi automatique, certainement au travers de la saisie des notes de frais. Il est en effet essentiel d’éviter toute charge administrative supplémentaire pour les chercheurs», précise Jean-Marc Triscone, vice-recteur chargé des objectifs de développement durable. En fonction de l’évolution des émissions, les mesures seront réajustées chaque année.

«Les déplacements en avion représentent environ la moitié des émissions de carbone de notre Université. Nous faisons aujourd’hui le choix d’une politique pragmatique basée sur la responsabilité individuelle et collective, dont certaines mesures peuvent sembler limitées, mais qui vise un impact significatif», précise Jean-Marc Triscone. Si l’optimisation de la consommation énergétique des bâtiments du campus est également un poste qui peut conduire à une réduction importante des émissions, celui-ci n’est pas sous le contrôle de l’institution, mais du propriétaire des bâtiments, l’État de Genève. Ce dernier entreprend d’ailleurs régulièrement des travaux d’assainissement, dont les plus récents concernent l’éclairage.

Hormis la mobilité professionnelle en avion, ce sont les déplacements quotidiens pour se rendre sur le campus qui présentent un important impact environnemental. Ainsi, une enquête sur les pratiques de mobilité a été lancée au printemps dernier. Elle montre que pour se rendre à l’UNIGE, 39% des collaborateurs empruntent les transports publics, 40% utilisent un mode de transport doux (vélo, vélo électrique ou marche) et 16% prennent leur voiture, leur scooter ou leur moto. Les derniers 5% pratiquent le covoiturage ou utilisent les P+R.

Concernant le corps estudiantin, les taux d’usagers de modes de transport durables sont encore plus importants: 56% en transports publics et 35% en mobilité douce, contre seulement 6% en transport motorisé. «Le taux de personnes venant au travail avec un mode de transport durable est réjouissant comparativement à d’autres institutions du canton, indique Mathieu Petite, coordinateur des actions de développement durable auprès de la communauté universitaire. Au niveau du Grand Genève, ce sont en effet près de 60% des personnes qui utilisent un transport motorisé pour leurs déplacements. À l’UNIGE, il sera difficile d’augmenter la part modale des transports durables, c’est pourquoi le plan mobilité de l’institution visera avant tout à rendre la vie plus facile à ceux qui ont opté, ou opteront, pour les déplacements durables. L’amélioration des infrastructures (abris de vélos, etc.) ainsi que différents soutiens financiers sont envisagés.» D’ici à décembre, un catalogue d’actions en faveur de la mobilité sera établi pour les cinq prochaines années et des priorités seront proposées au Rectorat, en tenant compte de leur impact et de leur faisabilité.  —