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1946-11-14, Denis de Rougemont à Henry Corbin

Très cher, quelle désolation si tu pars vraiment le 18 ! Car je ne puis être à Paris avant le 19 au matin, et encore cela dépend-il d’un visa qui tarde. Voilà trois semaines que je renvoie mon voyage. Terminé un livre aujourd’hui, bien qu’accablé d’autres affaires dont certaines pénibles.

Si le malheur veut que tu ne sois plus à Paris quand j’y serai, envoie-moi au moins ton adresse à Téhéran, que je puisse t’y écrire et t’adresser un ou deux livres quand ils paraîtront cet hiver. J’aurais tant voulu savoir ce que tu as pensé et senti de Paris, de l’Europe ! Je vais encore la quitter pour l’hiver, et puis j’y reviendrai au printemps, sans doute pour vivre à Paris et en Suisse, comme jadis.

J’ai retenu une chambre du Palais d’Orsay, 9 quai d’Orsay (sur la gare). Je pense y être mardi matin. Puisses-tu avoir quelque retard, comme tout le monde aujourd’hui ! Si oui, envoie un pneu ou carte que j’y trouverai en arrivant, et j’irai tout droit rue de l’Odéon.

Tibi — ubique et semper.
Denis de R.