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1951-08-10, Henry Corbin à Denis de Rougemont

Cher vieux Denis,

Dieu sait où tu es en ce moment, en train de faire de l’excellent travail sans aucun doute ! Pour nous, nous sommes ici comme chaque été, et comme chaque été nous nous apprêtons à partir pour Ascona. Cela promet. Jung y sera et doit parler Über die Synchronicität. Moi-même je parle sur le Temps cyclique dans le mysticisme et dans l’ismaélisme. Tout cela, à condition bien entendu que de nouvelles trombes d’eau ne coupent pas Ascona du reste du monde. Pour nous qui avons laissé Téhéran avec 45° à l’ombre, la pluie nous met plutôt de bonne humeur. Nous sommes assez isolés quant à ce point de vue ! Ce n’est pas du tout pour te le faire partager que je t’écris [p. 2] ces quelques lignes, mais pour tâcher de combiner notre petite rencontre. Nous repartirons pour Téhéran la seconde quinzaine d’octobre, avec l’espoir d’y retrouver nos Iraniens calmés et assagis (un espoir qui a autant de valeur que ce point de vue sur la pluie !). — Viendras-tu à Paris d’ici là ?

Nous comptons repartir pour Ascona, en passant par Bâle, le 21 prochain. Mais il est fort possible que, pour varier un peu, nous revenions par Genève, 31 août ou 1er septembre. Serais-tu dans les parages à ce moment-là ?? Dis-nous-le vite (notre adresse à Ascona en tout cas est Hôtel Casa Tamaro — ou bien « Eranos-Tagung »)

À bientôt, mon cher vieux Denis. Il y a encore et toujours tant de choses à nous dire. Très amicalement à toi.
Henry Corbin