Pour une métropole régionale Aix-Marseille-Étang de Berre [Avant-propos] (juillet 1963)a
La renaissance des régions dans les États qui ouvrent leurs frontières à des unions plus vastes, voilà bien l’un des phénomènes contemporains qui méritent le mieux de retenir l’attention du Centre européen de la culture, et du jeune Institut d’études européennes qui vient d’être créé dans ses murs.
D’autre part, l’initiative hardie de M. Roger Bigonnet, convoquant dans le cadre du festival d’Aix-en-Provence un colloque sur la décentralisation culturelle, illustre d’une manière exemplaire le rôle que peut jouer un festival dans cette renaissance des régions. Mon ami Roger Bigonnet n’a pas oublié que pour devenir membre de l’Association européenne des festivals de musique, dont il fut l’un des fondateurs, un festival doit être tout d’abord représentatif d’un genius loci, d’un climat régional, mais posséder en même temps un rayonnement international. Le festival d’Aix, qui satisfait à ces deux critères avec tout l’éclat que l’on sait, se trouvait donc prédestiné à servir de point de départ à une action de pionniers en faveur de l’essor régional dans les perspectives d’une Europe unie.
C’est donc au double titre de directeur du CEC et de président de l’AEFM que je me félicite de pouvoir accueillir dans nos publications le compte rendu du colloque réuni à Aix au mois de juillet 1962.
L’intérêt très particulier de ce Colloque tenait d’abord à sa composition : professeurs d’université, compositeurs de musique, écrivains et critiques s’y trouvaient pour une fois réunis autour d’une même table avec de hauts fonctionnaires nationaux, régionaux et municipaux, des [p. 8] députés, des dirigeants de comités d’expansion économique ou de la chambre de commerce, et enfin les représentants des plus importantes industries implantées dans la région.
Tous parlaient au nom de leur expérience professionnelle et d’une réflexion quotidienne sur les problèmes proposés par l’ordre du jour. La spontanéité de leurs interventions en fait le prix, autant que les compétences si variées des orateurs. Le général Claude Clément, rapporteur du colloque et auteur de son compte rendu, a donc eu bien raison de conserver autant que possible le caractère parlé et improvisé de ces débats : ils présentent, dans l’ensemble, une photographie qu’on ne pourrait souhaiter plus ressemblante des préoccupations, vœux, doutes et volontés des élites d’une région en plein essor, face aux nécessités, désormais reconnues, de ce que l’on a si justement nommé « la révolution régionale ».
On ne saurait reprocher à un colloque dont les ambitions initiales étaient d’ordre culturel, et qui a si bien réussi, au surplus, à mettre en évidence les liens entre la culture et l’économie, de n’avoir pu qu’effleurer les aspects administratifs, politiques et civiques du problème des métropoles. Fort heureusement, un autre colloque en avait traité peu de temps auparavant, à Lyon. Nous avons jugé opportun de reproduire à la suite du compte rendu d’Aix, le rapport présenté à Lyon par le professeur J.-L. Quermonne sur « La région et ses aspects politiques et sociaux ». La valeur de témoignage vivant et authentique du colloque d’Aix se trouve renforcée et confirmée par cette remarquable synthèse.