Cours

Les voyelles

Après la chute du temple en 70 de notre ère, les rabbins fixent le texte saint dans ses moindres consonnes. Toutes les autres familles textuelles qui existent auparavant disparaissent alors du judaïsme. Celles-ci ne nous sont donc plus accessibles que par quelques rares trouvailles archéologiques et des témoins issus d'autres mouvements religieux. Le respect de la lettre des consonnes dès lors fixées est fondamental pour le judaïsme postchrétien.

Ce n'est que bien plus tard, alors que l'hébreu devient une langue réservée à une élite d'érudits, que l'on met sur pied un système permettant de fixer la prononciation du texte biblique. Ceux qui accomplissent ce travail sont des savants juifs (dès le VIIe s.) que nous nommons les massorètes.

Dès le VIIe s., deux grands systèmes de vocalisation apparaissent : l'un mis sur pied en Babylonie et l'autre en Palestine. Ce dernier est l'ancêtre du système de Tibériade, dans lequel on distingue le système de la famille Ben Asher et celui de la famille Ben Nephtali. Le codex de Leningrad, à la base de l'édition de la Bible hébraïque sur laquelle nous travaillons, a adopté le système Ben Asher.

On remarquera donc que si les consonnes ont été fixées définitivement au Ier s. de notre ère, les voyelles ne le sont que neuf siècles plus tard. Les voyelles reflètent donc un état de la langue plus récent que les consonnes.

L'hébreu, un système de voyelles variables

On pense généralement que le proto-sémitique dispose de 3 voyelles de base, dont toutes les voyelles hébraïques découlent. Il s'agit des sons /a/, /i/ et /u/ (prononcer "ou").

L'hébreu parlé à l'époque la plus ancienne à laquelle les grammairiens pensent pouvoir remonter, l'"hébreu structural", en avait probablement huit : 3 brèves (i, a, u) et 5 longues (î, ê, â, û, ô).

L'hébreu massorétique que nous écrivons en distingue 11 :

  • le "e" audible ;

  • les 3 voyelles ultra-brèves (ḥaṭeph) ;

  • Les 7 voyelles écrites (longues ou courtes).

Les massorètes n'ont pas codifié la longueur des sons vocaliques.

La prononciation "sefardi" que nous adoptons distingue cependant pour 4 voyelles (qāmæṣ, sᵉgôl, ḥîræq et qibbûṣ) une prononciation longue et courte.

La distinction entre voyelles courtes et longues est assez difficile à faire. Pour l'instant, il n'est pas nécessaire de s'en préoccuper.

De fait, la distinction entre voyelle courte et longue ne pose problème que pour qāmæṣ, sᵉgôl, ḥîræq et qibbûṣ lorsque ces lettres ne sont pas suivies de mater lectionis. En effet, les voyelles associées à des mater lectionis sont généralement longues.

Nous reviendrons plus loin sur la question du qāmæṣ pour lequel on distingue le son "a" lorsque la voyelle est longue du "o" lorsqu'elle est courte.

Les signes de vocalisation se placent dans la plupart des cas sous la lettre.

Ce système est donc infra-linéaire. La voyelle se lit toujours après la lettre (sauf pour le pataḥ furtif).

מָ se prononce donc "ma" et non pas "am". Le ḥôlæm est la seule voyelle qui s'inscrive au-dessus (à gauche) de la lettre. Certains manuscrits n'indiquent pas le ḥôlæm quand il est suivi d'un šîn (ce n'est pas le cas dans le codex de Leningrad sur lequel l'édition de la Bible hébraïque que nous utilisons est basé).

Au niveau graphique, lorsque la consonne est carrée ou semi-carrée, la voyelle se place au milieu. Par contre, pour resh ר et daleth ד, la voyelle se place sous la barre de droite: רָ.

Les voyelles ultra-brèves (voyelles ḥaṭeph ou šᵉwaʾ composés) n'apparaissent que sous les gutturales (א ,ה ,ח ,ע).

L'alphabet des voyelles

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Vocalisation des matres lectionis

Voir également la page Matres Lectionis.

Lorsque les matres lectionis י et ה étaient indiquées dans le texte consonantique, les massorètes ont vocalisé la lettre précédente.

Exemple

Dans le terme בְרִית "alliance" prononcer bᵉrît le signe de vocalisation "i" est indiqué par un point sous le ר alors que la mater lectionis י n'a pas de signe de vocalisation. De même, dans le terme שָׂרָה "Sara" ou "princesse", la mater lectionis ה ne prend pas le signe de vocalisation qui se trouve sous le ר.

🔎Remarque
Le ה n'est mater lectionis qu'en fin de mot.

La mater lectionis wāw ו présente la particularité de prendre l'indication de la voyelle. Avec le son "o", le point se trouve au-dessus du wāw (וֹ) ; avec le son "ou", il se trouve dans le wāw (וּ). La consonne qui précède n'a alors pas de signe de vocalisation comme la lettre ק dans le terme מָקוֹם (māqôm).

Dans la grande majorité des cas, les matres lectionis indiquent des voyelles longues.

À partir de la fiche de grammaire hébraïque §2, on constate que le י ne peut servir de mater lectionis que pour ḥîræq, ṣerê et segôl (magnum) ; le ו pour le hôlæm et le qibbûṣ (dans ce dernier cas, on parle de šûræq). Le he peut servir de matres lectionis pour qâmæs, serê, segôl ou hôlæm.

🔎 Remarque
Il arrive fréquemment que les lettres י ו ה fonctionnent comme des consonnes. Ces lettres sont alors vocalisées pour elles-mêmes, comme toutes les consonnes qui les entourent.

Il est très facile de reconnaître une mater lectionis puisque, soit la mater lectionis elle-même (י ה), soit la consonne qui précède (dans le cas du ו), n'est pas vocalisée.

Les consonnes sans signes de vocalisation

Mis à part le cas des matres lectionis, la fin du mot est le seul endroit où une consonne ne reçoit pas de signe de vocalisation.

On ne trouve que quelques exceptions avec la lettre kâph final qui est vocalisée par un šᵉwaʾ afin ne pas être confondre avec le nûn final, et lorsque les lettres finales sont redoublées (ce point sera vu plus loin).

On peut encore rappeler que le ʾalæph peut être quiescent et que, dès lors, il se comporte comme une matres lectionis.


✏️ Exercice

Vous pouvez maintenant effectuer l'exercice 7.

Le corrigé se trouve dans l'onglet "Exercices" de la leçon.